Produire des batteries en flux continu

L'industrie automobile se prépare à un avenir dominé par les véhicules électriques. Nous avons rencontré l'expert en électromobilité de B&R, Ronny Guber, pour en savoir plus sur l'automatisation de la production de batteries pour véhicules électriques et sur les défis à relever dans ce domaine.

Nous voyons chaque jour de plus en plus de véhicules électriques sur la route. Peut-on dire que la tendance à l'électromobilité est forte ?

Ronny Guber – Absolument. La part de marché des véhicules électriques a continué à croître de manière exponentielle, même pendant le ralentissement global des ventes de voitures dû à la pandémie. Selon les prévisions actuelles, d'ici 2036, les voitures électriques dépasseront les véhicules à moteur à combustion interne et représenteront la majorité des ventes de voitures dans le monde.

Qu'est-ce qui alimente cette tendance ?

R. Guber– Les consommateurs sont de plus en plus motivés par la préservation de l'environnement. Beaucoup de gens ont intégré l'idée que leur prochaine voiture sera électrique. Leur décision d'achat reposera principalement sur deux critères : le prix et l'autonomie du véhicule. En d'autres termes, ils se demandront combien ils devront payer en plus par rapport à une voiture conventionnelle, et quelle distance ils pourront parcourir avant de devoir chercher une borne de recharge. Les batteries ont un impact déterminant sur ces deux aspects.

Dans quelle mesure ?

R. Guber – Les batteries représentent environ un tiers du coût des véhicules électriques. Il est donc essentiel de les produire efficacement pour rendre les prix plus attractifs pour les consommateurs. Et pour améliorer l'autonomie des véhicules, il faut non seulement mettre en œuvre rapidement les toutes dernières technologies de batterie, mais aussi respecter des tolérances de fabrication et instaurer des conditions de propreté nettement plus strictes que pour les pièces automobiles traditionnelles.

Est-ce que la production de batteries pourra suivre la croissance exponentielle des ventes de véhicules électriques ?

R. Guber – C'est toute la question. Dans une très large mesure, la réponse à cette question dépendra de la façon dont ces usines seront automatisées. Pour atteindre la capacité de production et l'efficacité économique nécessaires, les producteurs de batteries devront éliminer le stop & go entre stations de traitement et atteindre des temps de cycle bien inférieurs à ceux qui caractérisent la production de composants automobiles traditionnels. La production doit s'effectuer à grande vitesse et sans interruption, un peu comme si l'on passait d'une circulation en ville à une autoroute.

Et les technologies d'automatisation permettent cela ?

R. Guber – Oui, c'est la tâche centrale des technologies d'automatisation et, en particulier, des systèmes de transport intelligents. Dans ces systèmes, les produits se déplacent en continu, aucune intervention manuelle n'est nécessaire. Les étapes de fabrication sont exécutées sur des flux continus. Et lorsque ces flux peuvent être synchronisés avec d'autres composants d'automatisation, les temps de traitement de chaque station peuvent être encore réduits davantage.

Pouvez-vous nous donner des chiffres pour étayer cela ?

R. Guber – En synchronisant un système track avec des caméras, par exemple, il est possible d'identifier en 50 millisecondes des cellules de batterie défilant à 4 mètres par seconde, sans déclencheurs externes ni éclairage ni caméras spécialisées. Si l'on devait arrêter le produit, cette identification prendrait deux secondes. Le gain de temps obtenu est donc de 97,5%. Et beaucoup d'autres étapes dans la production de cellules de batterie comme, par exemple, le collage des cellules, peuvent être aussi exécutées à pleine vitesse, ce qui permet de réduire les temps de cycle de 90%.

Et l'accélération des différentes étapes se traduit par des gains de productivité.

R. Guber – Exactement. De plus, il n'est plus nécessaire de transférer manuellement les cellules d'un système de transport à l'autre. Un tel processus prendrait presqu'une minute pour dix cellules. Si l'on additionne toutes les secondes gagnées et multiplie le résultat par les quantités, on atteint un record absolu, tant en terme de pièces par minute que de densité de production et de disponibilité machine.

Comment réaliser cela au juste ?

R. Guber – Avec un système track intelligent, vous pouvez répartir le flux de production sur un grand réseau de stations interconnectées. Dès lors, les cadençages des stations peuvent être coordonnés, le nombre de stations de traitement réduit, et les zones tampon et zones de convoyage vides, qui prennent de la place sans créer de valeur ajoutée, éliminées. De plus, en parallélisant les stations plus lentes, vous pouvez augmenter la productivité sans augmenter l'empreinte machine dans des proportions similaires. Avec un flux de production en réseau, si une station est en défaut, les pièces sont redirigées automatiquement pour contourner cette station. Si la production était organisée selon un modèle linéaire classique, l'impact de petites interruptions sur le TRS serait bien plus grand.

Qu'est-ce cela signifie pour la production des batteries ?

R. Guber – Cela permettrait de mutiplier le rendement par ligne par 7. Les fabricants pourraient alors remplacer quatre lignes conventionnelles par une ligne ultra-rapide, et donc réduire l'empreinte totale de 75%. En d'autres termes, si vous avez une usine deux ou trois fois plus rapide, c'est comme si vous aviez deux ou trois usines. Au final, cela assure un excellent retour sur investissement.

Vous évoquiez aussi l'importance du time-to-market. En quoi les technologies d'automatisation peuvent-elles être bénéfiques ?

R. Guber – Absolument. Nous parlons d'un système de production de batteries totalement nouveau où les outils de développement, de test et de mise en service virtuelle basés sur la simulation jouent un rôle crucial. Grâce à ces outils, vous pouvez comparer des flux de produits et prédire des débits de production sans faire appel à un système matériel. Dans ce domaine, plus tôt vous savez ce qui vous attend, mieux c'est. Vous pouvez ainsi mettre en service votre système rapidement, en évitant tout retard coûteux et toute nouvelle conception.

Et qu'est-ce que tout cela implique en terme de développement logiciel ?

R. Guber – Si vous voulez accroître la production aussi vite que possible, il vous faut plusieurs équipes de développement travaillant main dans la main. Dans ce contexte, il est évidemment très avantageux de disposer d'un environnement de développement universel et collaboratif. Si tous les développeurs impliqués peuvent mettre en place des fonctions machine de base en utilisant des composants logiciels prêts à l'emploi, ils peuvent se concentrer davantage sur la mise en œuvre des processus qui sont spécifiques à la production de batteries.

Cette nouvelle voie s'annonce prometteuse pour l'industrie automobile.

R. Guber – Absolument. Et nous n'avons parlé pour l'instant que de la production de cellules de batteries individuelles. Lorsqu'il s'agit aussi d'assembler des cellules en packs et de monter ces packs dans les véhicules, la voie qui consiste à fédérer toutes les étapes de la production est clairement celle qu'il faut suivre. Avec la technologie d'automatisation intégrée de B&R et l'expertise d'ABB dans les domaines de la robotique et des véhicules autoguidés, nous sommes prêts à concrétiser ces nouvelles perspectives pour la production de batteries.

Merci de nous avoir accordé cet entretien !

  • Valeur ajoutée des technologies track pour la production de batteries
  • Gains de productivité importants moyennant un accroissement d'empreinte limité
  • Gains de rapidité de 90% pour les différentes étapes de traitement, voire davantage si des traitements s'effectuent sans stopper le mouvement des produits
  • Remplacement de 4 lignes conventionnelles par une ligne ultra-rapide, réduction de 75% de l'empreinte machine globale

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